René Derouin ou la nature retrouvée
Reconnu hors frontières depuis plus d’un demi-siècle, l’artiste multidisciplinaire René Derouin fait partie de ceux qui ont construit leur identité sur la terre fertile de leurs intuitions, au grand dam des conventions qui ont jalonné les époques passées.
« L’ère du plastique », c’est en ces termes que l’homme décrit une certaine mouvance associée à la modernité québécoise. C’est qu’au virage des années 70 et 80, les discothèques et la vie urbaine semblaient avoir pris le pas sur une conscience de notre territoire et de la nature qui le compose, devenus ringards à l’époque comme l’image d’un cultivateur labourant sa terre. « On a beaucoup parlé de changement social avec le Refus global, et l’abstrait a pris le devant dans les arts visuels à la fin des années 50. À cette époque, je revenais du Mexique où j’avais étudié dans une école où l’ancrage au territoire et à son histoire était très valorisé, alors qu’ici, la figuration et le narratif étaient maintenant considérés comme académiques et donc trop conventionnels. On m’a mis de côté, car mon travail ne représentait pas les valeurs de l’époque », explique M. Derouin.
« Or, pour moi, le véritable changement social est survenu avec des auteurs comme le Frère Marie-Victorin, qui nous a appris à nommer les choses, à comprendre notre territoire, à comprendre notre identité. Ça, pour moi, c’est révolutionnaire. Ce qui m’importe en premier lieu, c’est ma communauté, avant de penser à réussir ailleurs. C’est ici que j’évalue les choses comme elles sont, mon rayonnement ailleurs a été rendu possible, car je me suis incarné ici. C’est ce que j’appelle la transmission et qui guide ma création depuis plus de 50 ans. Être artiste, c’est être responsable. On doit redonner à la société avec notre travail et nos recherches. Il faut penser aux gens qui vont voir nos œuvres », poursuit celui qui réside à Val-David depuis plus de 45 ans.
« Être artiste, c’est être responsable. On doit redonner à la société avec notre travail et nos recherches. »
-René Derouin
Celui qui s’exprime par le dessin, la gravure, la peinture et la sculpture apprécie le retour du balancier social actuel, qui met de l’avant les enjeux environnementaux. « Les jeunes générations ont plus de préoccupations par rapport à l’endroit où ils vivent, plutôt que de rêver à l’international. Il faut se reconnaître soi-même avant d’aller ailleurs », affirme M. Derouin.
Engagement social
Depuis quelques années maintenant, un thème récurrent se présente dans les œuvres de René Derouin, celui des rapaces, ces oiseaux prédateurs qui occupent son esprit « de façon obsessive », confie-t-il. C’est en observant des pêcheurs lançant leur filet à l’eau au Mexique, ce coin de l’Amérique qui n’a jamais quitté son cœur, qu’une réflexion a trouvé son chemin. « Ces gens avaient un rituel en harmonie avec la nature. Ils prenaient uniquement ce dont ils avaient besoin. L’équilibre est possible quand chacun s’arrête lorsque les besoins sont comblés. Dans la société actuelle, les riches ne visent que l’accumulation de surplus, ce qui appauvrit tous les autres. Ce déséquilibre s’incarne dans une société de rapaces, des gens qui accumulent chaque jour plutôt que de respecter le cycle naturel », dit l’artiste.
Ce thème, c’est celui qui se retrouve dans l’œuvre que M. Derouin a soumise à la 8e édition de l’encan-bénéfice pour Le Centre d’Apprentissage Parallèle de Montréal (Le CAP), connu sous le nom de « Moi m’aime, cent autoportraits », qui aura lieu du 5 au 19 mai. Habituellement tenu au Musée des Beaux-Arts à Montréal, l’évènement en sera à sa deuxième édition virtuelle. Les fonds recueillis permettront au CAP de financer ses activités d’accompagnement de personnes présentant des problèmes de santé psychologique afin de faciliter leur processus de croissance vers une intégration sociale et professionnelle. Pour y parvenir, l’organisme met de l’avant l’art-thérapie auprès de ses bénéficiaires.
« Au départ, j’ai trouvé curieux de faire un portrait de moi. L’autoportrait n’est pas dans mes habitudes de création. Mais c’est une œuvre faite spécialement pour eux, une pièce unique faite d’un collage de papiers japonais en transparence, un peu à la manière d’un vitrail. Le personnage est rempli d’oiseaux. C’est plus une représentation de mon obsession pour les oiseaux que de moi-même en fait. Cette image représente une idée de moi, et du travail que je fais depuis des années », conclut M. Derouin.
Pour en savoir plus sur l’évènement : ateliersducap.org/fr/moimaime/
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