Potiers de Mont-Tremblant
Une vie animée de passion pour la poterie
Un couple de potiers de grande expérience parle de sa relation avec un métier, qui se façonne longuement et sans fin. Rencontre :

Ils s’appellent Estelle Morin et Raymond Phaneuf. À 82 ans, elle se décrit comme une bête d’énergie. « Raymond me dit que je ne suis pas capable d’arrêter, alors que moi, j’ai l’impression de ne rien faire », dit-elle en riant. Son conjoint aura bientôt 80 ans. Il souligne à la blague que sa femme se vante d’avoir marié un « p’tit jeune ». Il rit aussi.
Le couple Morin-Phaneuf travaille l’argile depuis une soixantaine d’années. À eux deux, ils cumulent plus de 100 ans d’expérience dans l’art de confectionner de la poterie. Leur atelier de Mont-Tremblant existe depuis 22 ans. Avant cela, ils étaient à Prévost, la terre natale d’Estelle. Pendant près d’un quart de siècle, ils ont participé au Salon des métiers d’art du Québec, la grand-messe de l’artisanat tenue annuellement à Montréal. Maintenant, ils se contentent de leur boutique atelier près du parc des Voyageurs. Leur clientèle est déjà bien établie. Leur métier, ils l’ont façonné avec le temps, à deux.
« Nous, à deux, on forme un seul potier ! », lance Raymond. Il décrit la danse qui s’installe dans leur atelier, lorsque vient le temps de la production. « Sans se parler, on se comprend. Les mains s’activent. Et on se surveille – toujours! –, pour ne pas commettre d’erreurs ».
Laboratoire
Sur une étagère de leur atelier, des boîtes étiquetées contiennent diverses poudres. C’est l’espace laboratoire. Tel bleu vient du cobalt; tel autre bleu, du fer. Le baryum modifie les couleurs. Le lithium est un agent fondant. Titane, kaolin, carbonate. « On ne rentrera pas trop dans la technique, sinon on n’a pas fini », tranche Raymond, visiblement passionné par ce que la Terre offre comme matériaux.
« La poterie, c’est simple : c’est un tesson avec de la vitre dessus. Cela dit, après, ça commence à se compliquer, parce que chaque glaçure contient une série d’éléments, et là, des jeux de chimie et de physique se déroulent dans le four », explique-t-il.
Selon le couple, le métier de potier est long à apprendre. Pour y arriver, il faut énormément de pratique, de curiosité, de discipline, mais aussi une bonne dose d’humilité. « Les gens pensent que c’est moi qui ai formé la poterie, mais c’est elle qui m’a formé, explique Raymond. Grâce à elle, au fil des années j’ai découvert des possibilités et j’ai développé ma capacité, celle de la maitrise sur des matériaux. »
« On se cherche toute notre vie quand on fait de la poterie. » Estelle Morin, potière
Ont-ils des conseils pour la relève? « Il faut beaucoup aimer la poterie et aimer bûcher : c’est un métier qui est long à apprendre », souligne Estelle. Son mari ne sait pas s’il doit prodiguer des conseils. Il se souvient de ses propres débuts, chaotiques à bien des égards, et de ces années de jardinage pour la Ville de Montréal en été et de potier en hiver. Tout cela le fait réfléchir.
« J’ai toujours dit que j’avais plus fait vivre la poterie que l’inverse, parce que je l’ai financée, je l’ai rendue vivante – autrement dit, j’ai pris de l’argile et j’ai rendu la tasse vivante : un objet qui parle et qui ressemble à quelqu’un, à quelqu’un que vous connaissez. Pour moi, il fallait qu’il y ait un sens, pour que la personne puisse prendre la tasse et savoir que celui qui l’a faite existe. Je n’ai jamais été profondément un commerçant : c’est évident qu’il faut vendre si on veut renouveler la matière première, si on veut manger, cela saute aux yeux, mais je n’ai jamais fait de la poterie dans l’idée de devenir riche. C’est ma façon de voir les choses », termine-t-il.

Pour Raymond Phaneuf, la poterie se doit d’être usuelle : bols, assiettes, tasses, verres. Il vante les qualités de la poterie en général, qui est non toxique, solide et durable. (Photo L’info du Nord – Véronique Piché)
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