Fernand Léonard raconte Noël, d’hier à aujourd’hui
Du plus loin qu’on puisse remonter dans l’histoire du peuple québécois, Noël et le Jour de l’An ont toujours été des moments forts. Toutefois, la façon de souligner ces journées particulières a grandement évolué depuis un siècle. Fernand Léonard, 93 ans, en témoigne.
Né au sein d’une famille de 16 enfants sur une ferme près du lac Maskinongé, à Saint-Jovite, M. Léonard se rappelle que dans sa jeunesse, le temps des Fêtes commençait le 24 décembre en allant couper un sapin sur la terre de son père pour en faire un arbre de Noël. « Ç’a longtemps été ma job dans la famille. Il fallait un arbre choisi avec soin, bien fourni, et surtout, ne pas se tromper et prendre une épinette! », glisse-t-il en riant.
Une fois le sapin installé dans la maison, sa mère le décorait. À la crèche installée à son pied (achetée au village, un privilège!) s’ajoutaient de nombreuses guirlandes, surtout argentées grâce à du papier d’aluminium, et des boules en verre. Pendant ce temps, ses sœurs les plus vieilles finissaient de cuisiner de grandes quantités de nourriture en prévision du réveillon: boulettes pour le ragoût, saucisses de porc, bœuf, tourtières, beignes, tartes, gâteaux, sans oublier la traditionnelle bûche de Noël.
Les décorations faites, il fallait maintenant se préparer à aller à la messe de minuit. « On mettait des briques dans le fourneau et, quand elles étaient chaudes, on les installait dans notre voiture tirée par un cheval pour rester au chaud durant le trajet jusqu’à l’église. On s’emmitouflait dans des couvertures chaudes aussi, car au retour, les briques étaient rendues pas mal tièdes! »
La religion au cœur de Noël
À la messe de Noël, l’église était bondée. Tous les bancs étaient pris, les jubés et même les escaliers étaient pleins. Plusieurs bûcherons quittaient leur « camp » pour la durée des Fêtes, et ayant commencé à prendre un peu d’avance dans les célébrations à l’hôtel du village, parlaient fort et sentaient l’alcool, au grand désespoir du curé.
« C’est mon grand-père Joseph qui commençait la messe en chantant Minuit, chrétiens. Il chantait très juste, on était tous très fiers de lui dans la famille », se souvient M. Léonard. La messe, célébrée en latin, se terminait vers les deux heures du matin. Il fallait alors rentrer à la maison où un réveillon attendait toute la famille. Après avoir bien mangé, tous allaient ensuite au lit, pour se réveiller le matin du 25 décembre.
Jusqu’à son mariage en 1947, Fernand Léonard n’a jamais reçu de cadeau de Noël. Les bas de laine accrochés pour chacun des enfants étaient remplis uniquement le 31 décembre, pour être ouverts après minuit au Nouvel An. On y trouvait une pomme, une orange, des bonbons, des jouets et des mitaines. « Les bonnes années, papa nous offrait une traîne sauvage », se remémore le nonagénaire.
« C’est rendu à nous, quand on a eu nos enfants, qu’on a commencé à mettre les cadeaux emballés sous le sapin et à les donner à Noël plutôt qu’au Jour de l’An », confie Fernand Léonard.
Comment alors se déroulait le 25 décembre? « C’était bien tranquille, confie M. Léonard. Il y avait peu de visites le 25. On se rendait chez grand-père Léonard, au village de Saint-Jovite, pour écouter des chants de Noël à la radio. C’était très religieux. » Comme la famille était nombreuse, seulement une partie des enfants allait visiter le grand-père, l’autre demeurant à la maison sous la bonne garde d’une sœur aînée. « On alternait, d’une année à l’autre », confie l’homme.
Le Jour de l’An
C’est bien davantage à partir du Jour de l’An que c’était la fête à l’époque. « De la famille de Brébeuf, d’Huberdeau, du lac Sauvage descendait pour l’occasion. Ça se visitait entre eux, un allait chez l’un, puis chez l’autre. Chaque enfant de mon grand-père recevait une journée, on faisait la tournée jusqu’à la fête des Rois le 6 janvier », se rappelle Fernand Léonard.
Le 1er janvier, tous convergeaient, une fois encore, chez le grand-père Léonard. Il n’y avait pas de bénédiction paternelle du Jour de l’An, cependant. Il faudra attendre son mariage avec Jeannette Labonté, en 1947, pour que M. Léonard soit mis en contact avec cette coutume.
« Chaque fois qu’un enfant Labonté arrivait chez son père au Jour de l’An, il s’agenouillait et mon beau-père le bénissait, un par un. Quand j’ai eu mes propres enfants, j’ai repris ça, mais moi, je bénis tout le monde en même temps », confie l’homme de 93 ans.
Pas de bénédiction, certes, mais l’alcool était bien présent. Le père de M. Léonard achetait alors du whisky à 92% d’alcool, qu’il coupait avec de l’eau. Les hommes buvaient du whisky, les femmes du vin St-Georges. « Quand ç’a été rendu à nous autres de recevoir pour les Fêtes, on a ajouté la bière, qui a pris de plus en plus de place. De nos jours, le whisky, plus personne ne boit ça aux Fêtes! », glisse Fernand Léonard.
Les langues se déliant avec l’alcool, l’ambiance devenait festive. En une veillée, on entonnait une cinquantaine de chansons, pour la plupart issus du répertoire traditionnel, mais certaines à la dernière mode. « Du côté de ma femme, c’était plus des musiciens, mais chez nous, on chantait, pas de musique », se remémore le vieil homme.
Et maintenant
Si plein de choses ont changé depuis sa naissance en 1926, l’importance de se réunir pour les Fêtes, elle, demeure, selon Fernand Léonard. « Quelques semaines avant Noël, les fêtes d’employés de bureau se succèdent. Il n’y a plus de messe à minuit, avec le manque de prêtres. Dans certaines familles on retrouve plus de 50 cadeaux, certains de grande valeur. Mais la journée de Noël se passe encore avec parents et amis et plusieurs familles ont gardé les traditions du Jour de l’An », conclut-il.
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